Cette semaine, j’avais envie de faire un texte où je m’en tiens à parler du restaurant sur lequel porte l’infolettre plutôt que de dériver vers les cent-cinquante autres choses qui me passent par la tête quand je me mets à en parler.
Vendredi soir dernier, alors que tombait sur Montréal la première tempête de neige, je suis sorti marcher. Je laisse habituellement mes pas me porter vers le parc Molson, empruntant les rues et les ruelles rosemontoises au hasard jusqu’à ce que j’y arrive. En cette soirée, ils m’ont toutefois mené vers le nord, dans Villeray. C’était particulièrement paisible, la neige, s’accumulant sur les arbres et le trottoir absorbait le son de la ville ; je remontais la rue Henri-Julien dans un silence me donnant l’impression d’être en pleine forêt. En atteignant la rue Jarry, j’aperçus de l’autre côté de la rue, à travers les flocons, l’enseigne orange du restaurant Knuckles. Les fenêtres embuées brouillaient la vue sur ce qui se passait à l’intérieur. Je pouvais tout de même m’imaginer l’énergie habitant le lieu, me remémorant ma dernière visite. Ce refuge semblait être, cette nuit-là, le cœur du quartier. Le restant de ma balade, je pensais au chanceux et chanceuses qui s’y étaient taillés une place.
Derrière ces vitres embuées, rendant l’endroit encore plus mystérieux, s’y sert une nourriture tout à fait unique. À une ère où bon nombre des restaurants et des buvettes montréalaises cherchent à élaborer des plats soit expérimentaux, soit minimalistes, Knuckles semble avoir pris une tout autre approche. La lecture du menu ne m’avait pas immédiatement fait saisir le type de repas y étant offert, je n’arrivais pas à dire : « C’est X genre de restaurant. ». Lorsque furent posés sur notre table les premiers – lors d’une visite il y a quelques semaines avec des amis – et que nous attaquâmes les Knuckles, leur plat emblématique, nous fûmes agréablement surpris de découvrir qu’ils renfermaient dans leur pâte frite des tomates et plein de fromage, nous apportant une vague de chaleur et de réconfort.
Mon ami Raphael fit la comparaison avec une pizza pochette de qualité. Avec du recul, je dirais une pizza pochette sous stéroïdes...c’était du solide, et ce n’était que le début. Une sorte de vol-au-vent à la courge nous apporta de la douceur, une fabuleuse rémoulade ajouta un peu de croquant et les cavatelli, avec leurs chanterelles nous époustouflèrent.
On associe souvent le comfort food à des viandes braisées des heures durant, des boulettes suédoises ou des riches lasagnes à la sauce à la viande. Ce qu’il y a de remarquable avec Knuckles, c’est que l’on retrouve tout le réconfort et la chaleur de ce type de repas, mais l’entièreté du menu – du moins, elle l’était au moment de ma visite – est végétarienne. Les légumes y sont présentés dans certains cas de manière très originale ; par exemple, l’idée de faire un vol-au-vent sans viande semble audacieuse, mais ça fonctionne totalement.
Les rideaux, les chandeliers et l’ensemble du décors participent au sentiment de confort. Les assiettes dépareillées y contribuent aussi, ça nous rappelle qu’on y est pour la bouffe. On s’y sent un peu comme dans un petit chalet chauffé par un feu de foyer. Réconfortés par les plats, on a un sentiment d’après-ski. Seul le cellier qui, en soi, est un frigo à bière dont l’usage a été tourné en l’entreposage d’une boisson plus noble (st’une jokeee, c’est bin correct la bière, c’est juste que ça me fait faire trop de rots), trahit cette impression et nous ramène à Montréal.
Avec la neige et le froid faisant maintenant partie du quotidien, je vous recommande, si vous vivez dans Villeray ou si vous passez par Villeray bientôt, d’aller vous réchauffer avec des Knuckles, et vous réconforter avec quel qu’autre plat se trouvant sur la carte. Mes coups de cœur étaient les Agnolottis au Bleu Élizabeth – qui est dans mes bleus québécois préférés – et la rémoulade.
J’espère que ce texte, un peu différent des autres que vous venez de lire vous aura plus. Dans tous les cas, ce fut un plaisir d’échanger avec vous ce soir, on se reparle très bientôt!