Je suis allé voir un DJ set de The Dare samedi dernier. La programmation était vraiment Dimes Square coded. À 2h, en franchissant la porte de sortie de la SAT, j’espérais mettre les pieds sur Canal Street, mais la 55 est passée devant mes yeux au même moment, emportant mes rêveries avec elle – et laissant mon corps attendre le prochain bus sur le trottoir. En guise de consolation, j’ai écrit sur l’épicentre de Dimes Square, dans lequel j’ai soupé il y a deux mois : Cervo’s. J’ai fait le non-effort de prendre un ton qui matche l’ambiance du quartier.
On a essayé d’aller au Cervo’s la dernière fois qu’on est venu, mais y’avait pas moyen d’avoir une table. Je suis plus East Village que LES, mais ça fait toujours plaisir de descendre une couple de blocs pour visiter Sweet Pickle Books, Leisure Centre et prendre une pointe au Scarr’s.
Cervo’s, c’est pas mal le cœur de Dimes Square. Si, contrairement à moi, vous ne consommez que de la culture québécoise et que Dimes Square ne vous dit rien, vous pouvez trouver 400 articles écrits l’an dernier sur le micro-quartier. Vulgairement résumé, c’est le pays des jorts & wife pleaser/white beater/partner respecter (appellez-les comme vous voulez), de la post-irony, et de Flynn McGarry (pcq on y trouve le fameux Gem Wine). Y’a aussi, Cervo’s, Dimes, Scarr’s,Contra, Mam, Corner Bar, etc. Dans la rue, tu croises des cool-kids en route vers un pop-up au Colbo et toute sorte de podcasteurs : Adam Friedland, The ION Pack, et les néo-catholiques de Red Scare. Si tu veux bien blend dans ce micro melting pot, tu vas prendre un verre au Clandestino, au Up Stairs ou au Bar Belly. Perso, je passe mon tour parce que je ne suis pas assez riche pour me faire défoncer par le taux change deux fois dans la même soirée.
L’éclairage est vraiment tamisé. On est assis au bar. Mathilde aime l’ambiance ; moi aussi. On a l’impression que tout le monde autour a notre âge, ça arrive jamais à Montréal. Canal Street est piétonne à cette hauteur et une famille de touristes Floridiens paraît s’être accidentellement assise à une des tables du resto. Ce sont les seuls à être assez débiles pour manger au soleil en plein milieu de la rue pendant la canicule. Il fait genre 39 degrés avec 83% d’humidité. Pas besoin de visiter le Russian & Turkish Baths d’East Village durant ce séjour, on les a à même la rue. Un plus grand débile arrive quelques minutes plus tard avec sa chemise à manches longues et son pull en laine sur les épaules. Comment ne pas apprécier cette ville et le dévouement de ses habitants à leur style vestimentaire ?
La barmaid nous sert un carignan espagnol vinifié en blanc dans des verres sans pieds. Je ne suis vraiment pas surpris. Ça va avec l’ethos du quartier.
La cuisine est à gauche du bar, le long du comptoir. Les meilleures tables sont au fond et pour les groupes de 4. Tous les employés sont hot et plus cool que pas mal tous les clients. Et les clients mettent la barre haute, ça non plus ça arrive jamais à Montréal.
Les moules sont bonnes. On en a mangé des meilleures l’automne passé à Place des Fêtes. Cette barre-là est impossible à dépasser.
Notre serveuse a préparé au moins 35 cocktails en 20 minutes. Son rythme a beau être déjanté, les glaçons tombent à peine dans le verre qu’ils virent en eau. Normal que je sois encore en sueur. J’aurais dû amener plus de t-shirt, c’est une journée à 2-3 t-shirts facile. Notre bouteille de carignan est gardée sur glace, une chance. Chaque refill fait baisser ma température corporelle d’un degré. Je regarde la cuisine et je suis bien content de ne plus travailler devant un four.
On a aussi mangé des clams et un plat de tomates beefsteak et morue salée, mais je m’en rappelle pas plus que ça. Je sais que les tomates étaient juteuses et bonne comme si on les mangeait les deux fesses assises dans l’champ, mais faut pas me demander plus de détails. Pour les clams, c’est flou aussi ; je me souviens juste m’être dit que le plat est bon mais qu’en soi, c’est pas le meilleur des fruits de mer. Je me souviens des frites par contre. Elles étaient toutes fines et trop bonnes. C’est rare qu’un resto du genre met des frites sur son menu ; avec le vin ça le fait.
Les toilettes répondent à tous les critères de la toilette newyorkaise (je les ai énoncés dans ma dernière infolettre). En me lavant les mains, je lève les yeux et je me trouve vraiment beau ; j’ai une crise de narcissisme, je fige pendant deux ou trois secondes. Si mon resto de quartier avait ces toilettes-là, j’aurais moi aussi toute la confiance du monde pour devenir une personne influente et cool. Je prends une photo de moi avant de sortir. C’est à ce moment-là que je réalise à quel point les places au fond sont bien. Faut revenir à quatre un jour.
Le dernier plat est un poisson, un branzino pour être précis. Il est posé côté chaire dans l’assiette. Sur la peau croustillante, il y a des oignons et des pommes de terre. Une sorte de beurre crémeux s’accote sur le rebord de l’assiette. Meilleur plat de la soirée, c’est une opinion unanime.
Mes descriptions manquent de clarté. Comme je l’ai précisé, il faisait vraiment chaud cette journée-là. J’étais déshydraté. J’ai pas retenu tous les détails du souper, mais suffisamment pour dire que c’était bon et que c’était cool.
En sortant, il fait noir ; on remonte Allen St. Je suis plus capable d’être en sueur. On descend dans le métro à Grand St. « C’est la dernière fois qu’on vient ici en juillet. »